A retrouver en intégralité sur le site de 02.
Lindre-Basse, 1.09 – 30.11.2020
Après trois mois passés à Lindre-Basse, la résidence gérée par le centre d’art contemporain de la Synagogue de Delme, l’artiste français Floryan Varennes devait présenter ses dernières productions dans un open studio. Mais crise sanitaire oblige, le système institutionnel a trouvé pour seule possibilité de rebond de maintenir cette ouverture par un live diffusé sur les réseaux sociaux. À 16h, le 12 novembre 2020, en direct sur Facebook et Instagram, avait lieu la présentation du passionnant travail de l’artiste. À travers une conversation avec le directeur du centre d’art, Benoît Lamy de La Chapelle, la violence des œuvres, bien plus que d’être précisément perçue, nous a été racontée. Quand bien même il serait possible d’en voir tout à fait chaque détail, les propositions olfactives ne permettent pas d’être envisagées autrement que par le témoignage et le récit.

Heureusement pour Floryan Varennes, les notes qui le ravissent sont celles, bien connues, de la lavande. Il a rencontré cette plante aux petites fleurs granuleuses et aux propriétés formidables au cours de ses recherches sur le Moyen-Âge et particulièrement à la lecture des études herboristes d’Hildegarde de Bingen. L’artiste est fasciné par le monde trop souvent encore qualifié d’obscur qui s’étend du Ve au XVe siècle. D’ordinaire mécompris, ce temps a pourtant vu s’épanouir une riche littérature autour des thématiques que sont l’amour, la violence et le care. Jouant de cette esthétique médiévalistique, l’artiste tisse des liens entre expression et réception de ces trois enjeux où le corps est central. La lavande, dans la proposition scénographique qu’il en fait ici, réunit ces trois aspects.
Dans Milles fleurs, hommage aux tapisseries du XVe siècle, Floryan Varennes jonche le sol de l’espace de plusieurs dizaines de kilos de lavande égrainée et invite le visiteur à marcher sur ce crissant tapis mauve. À chaque pas posé craquent les brins qui diffusent l’entêtant parfum purifiant depuis toujours les maisons de Provence. Bien que les vertus de cette fleur soient multiples (sédatives, antiseptiques, antispasmodiques, calmant les maux anxieux, la nervosité et favorisant la cicatrisation), respirés fortement, ses grains odorants peuvent agresser les yeux, irriter la gorge et devenir difficilement supportables. Là, dans cet espace épris d’effluves, les propriétés prophylactiques et curatives de la plante se transforment en désagréables relents. Violence et soin donc, mais aussi amour puisque la lavande est aphrodisiaque et qu’elle entre dans la composition de nombreux parfums. Portées comme parure et historiquement affiliées au masculin (notamment dans les Eaux de Cologne), les fragrances de « l’or bleu » répondent au contrasté discours esthétique de l’artiste.